Avec la maladie Covid-19, comme dans le cas des maladies de l’amiante, même s’il existe des expositions domestiques et extra-professionnelles évidentes, si un salarié déclare une pathologie et présente des séquelles, alors que les moyens de prévention adaptés ne sont pas en place sur le lieu de travail, les juges diront que c’est la faute du patron.
Les premiers jugements d’entreprises, en lien avec le risque d’exposition au SARS-COV2, ont démontré qu’il ne suffit pas que les moyens matériels soient en place, encore faut-il qu’ils soient effectivement et correctement utilisés. La prévention contre les expositions au coronavirus étant largement basée sur le comportement des uns et des autres vis-à-vis des mesures de distanciation physique et d’hygiène des mains, il faut pouvoir démontrer que les différents intervenants ont été instruits de l’importance de ces mesures et même associés à la décision de les imposer.
Dans une ordonnance de référé, datée du 9 avril, il est reproché à la société LA POSTE de ne pas avoir mis à jour son document unique d’évaluation des risques professionnels (DUER), en tenant compte notamment des risques psycho-sociaux. Il est rappelé qu’il faut procéder à une évaluation détaillée de chacun des risques professionnels identifiés du fait spécifiquement de l’actuelle crise sanitaire d’épidémie de Covid-19, en application de l’article L4121-2 du code du travail.
Dans une autre ordonnance de référé, du 14 avril 2020, à l’encontre de la société Amazon il a été reproché de ne pas avoir suffisamment associé le Comité Social et Economique à la démarche d’évaluation des risques, et de ne pas avoir mis en place les mesures permettant de respecter les principes généraux de prévention appliqués au risque de Covid-19.
Il est important de souligner que de l’identification d’un risque particulier par l’employeur découlera la réglementation applicable et les exigences qui vont avec. Ainsi, par une ordonnance en référé du 3 avril 2020, il a été reproché à une association d’aide aux personnes à domicile de ne pas appliquer la règles de prévention contre les agents biologiques visés aux articles R 4421-1 et suivants du code du travail. En effet, un risque biologique spécifique, classé comme mortel, avait été identifié dans le DUER de l’association, comme étant lié à l’intervention à domicile pendant une épidémie ou une pandémie, par exemple de Covid-19.
De fait l’absence de dépistage des malades laisse planer le doute sur le risque d’infection du personnel lors d’interactions avec les personnes visitées, ce qui a conduit les juges à considérer que le risque de contact avec un agent biologique pathogène est bien réel.
Le même type de réglementation s’est vu récemment appliquer, dans une ordonnance en référé du 5 mai 2020, demandant à un supermarché, d’associer le personnel aux mesures prises pour réduire le risque de Covid-19, de mettre régulièrement à jour son DUER , mais aussi de procéder à l’information individuelle et à la formation des salariés sur le port des EPI, et à la formation à la sécurité relative au risque biologique des travailleurs prévue à l’article R 4425-6 du code du travail.
Le fait que l’activité de commerce relève de la réglementation sur la prévention des risques biologiques s’est vu justifié par le fait que, d’une part, l’entreprise a identifié ce risque dans son document unique, et d’autre part que ses employés sont “amenés à manipuler des quantités de produits importantes, touchés par ailleurs par des clients potentiellement affectés, la plupart du temps sans protection pour ce qui concerne ces derniers (…)”
Si le guide de l’ OPPBTP et le protocole national de déconfinement ne font pas spécifiquement référence aux mesures de prévention contre les risques biologiques, à la lumière de ces décisions de justice, on ne peut qu’insister sur l’impérieuse nécessiter d’identifier les personnes malades ou présentant certains symptômes de Covid-19 au plus tard à leur arrivée sur lieu de travail, et de leur refuser l’accès. De même, en cas d’apparition de symptômes en cours de travail, les personnes concernées doivent pouvoir être isolées. En effet, à partir du moment où une personne malade est identifiée sur le lieu de travail, le risque d’exposition à un agent biologique pathogène ne peut être ignoré et les mesures de protection à mettre en oeuvre seront plus lourdes que les recommandations du guide de l’OPPBTP.
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mai 10, 2020 at 11:05[…] en concertation avec les salariés et le service de santé au travail, comme l’on montré de récents jugements. Pas de panique […]